mardi 30 décembre 2014

II. Le rôle méchant attribué à la Bête


A. Création de la personnalité de la Bête

Dans le conte de Le prince de Beaumont, la Bête est considérée comme bienveillante : « il n'y a ici de maîtresse que vous. Vous n'avez qu'à me dire de m'en aller, si je vous ennuie ; je sortirai tout de suite » (16). Dans le film de Disney, adapté à ce conte, la Bête semble être constamment en colère et triste. Ils lui ont donné un caractère plus primitif afin de montrer le côté animal sauvage de ce personnage. Ils ont tout de même dû lui donner un aspect plus humain pour qu'il soit imaginable que le personnage de Belle en tombe amoureuse.
D'après Glen Keane, c'est la personnalité de la Bête qui est le plus important et non son physique. Il doit être trois bêtes à la fois ; « un animal féroce qui court à quatre pattes et se bat contre les loups, un personnage comique qui essaie maladroitement de dominer son mauvais caractère (j'ai pensé à Jackie Gleason) et finalement un bête sensible, capable de sentiments profonds, une sorte d'Elephant Man qu'il fallait dépeindre avec délicatesse » (17).
 
B. La méchanceté de la Bête à travers ses actions

Aux yeux des spectateurs, ce personnage est tout d'abord perçu comme étant un méchant à cause de ses actions. Dès le début de l'histoire, il est présenté comme un prince égoïste, capricieux et insensible. Il a ensuite un comportement souvent mauvais dans la première moitié du film. Pour commencer, il se montre féroce face au père de Belle, Maurice, qui s'est introduit dans son château alors qu'il était perdu dans la forêt. Il décide de le séquestrer dans son cachot. Puis lorsque Belle supplie la Bête de laisser son père partir, il refuse jusqu'à ce qu'elle décide de prendre sa place comme prisonnière. Aussi, nous pouvons voir qu'il traite ses serviteurs, transformés en objets animés, avec peu de respect et que ceux-ci le craignent. La Bête fait preuve d'un comportement odieux, notamment parce qu'il n'arrive pas à se maîtriser et qu'il a de subites colères lorsqu'un sujet le fâche. Cette image montre les dégâts qu'a fait la Bête dans une partie de son château lorsqu'il a été transformé en monstre.
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Aussi, quand Belle franchit cette partie qui est l'aide ouest du château où il lui a été défendu d'entrer, la Bête ne peut pas s'empêcher de tout détruire, allant même jusqu'à la menacer.
Un héros a un comportement opposé à celui de la Bête ; il est agréable, serviable et irréprochable. Ce personnage ressemble davantage aux méchants des autres Walt Disney. Il ressemble aux personnages destructeurs tels que Maléfique dans « La Belle au bois dormant » puisqu'elle n'a aucune raison de s'en prendre particulièrement à Aurore, ou le personnage de Frollo dans « Le Bossu de Notre-Dame » qui n'a aucune raison d'être méchant, si ce n'est le plaisir de détruire un peuple. La Bête n'a elle non plus aucune raison d'être mauvaise, étant un prince, et sa seule raison de l'être lorsqu'elle se transforme en monstre, est de vouloir se venger de sa misérable vie. Ce type de méchants véhiculent le message selon lequel la méchanceté est purement gratuite.
 
C. Le véritable méchant de l'histoire : Gaston
 
Gaston apparaît dans le film en tuant un oiseau avec son acolyte, nommé Le Fou. Cette action le définit dès le début. Il est en effet le vrai méchant de cette histoire. Ce personnage a été rajouté par rapport au conte de Le prince de Beaumont. Walt Disney le qualifie d'« un méchant d'un nouveau genre » (19). Il a été un véritable challenge pour les producteurs. Au début, il a été traité comme un personnage comique mais ils ont décidé de le prendre plus au sérieux afin de renforcer la crédibilité de sa menace. Graphiquement, sa création, faite par Andreas Deja, a été plus compliqué que pour les méchants habituels de Disney. Il fallait quelqu'un de beau et de respectable et en même temps de mauvais et de haïssable. Le méchant de l'histoire a donc pour une fois un physique avantageux, ce qui est rare dans les films de Walt Disney.
Gaston est amoureux de Belle dès le début de l'histoire et veut l'épouser à tout prix. Il met en avant le rôle de la sexualité dans les pulsions qui animent les méchants. Il apparaît comme un beau garçon mais suffisant. Mais le dessin de Gaston change au fil de l'histoire ; son visage se creuse et sa mâchoire devient plus carrée. Il se virilise de plus en plus à cause de son désir de posséder Belle. C'est donc la pulsion sexuelle et l'amour-propre qui le transforment en véritable méchant. Ce personnage fait parti du types des méchants cupides. Ils ont un but, un objectif ; il les pousse à agir de façon machiavélique car ils veulent arriver à leur fin. Ce n'est pas par haine qu'ils sont méchants. Leur principale motivation est donc le pouvoir et leurs préoccupations sont souvent vénales. Les films de Walt Disney montre que la méchanceté ne conduit qu'à l'échec et que l'attitude déloyale ne peut pas être adoptée.
Gaston est prêt à tout pour épouser Belle. Il commence par la demander en mariage mais quand il comprend qu'il n'arrivera pas à la faire changer d'avis, il décide de l'y forcer. Il soudoie alors le directeur de l'asile grâce à de l'argent et lui demande en échange de faire interner le père de Belle, pensant qu'il pourra faire du chantage à Belle. Lorsque Gaston semble voir que sa bien-aimée a des sentiments pour la Bête, il s'empresse de terroriser le village afin que tout le monde aille confronter cette bête. Il agit constamment en fonction de son propre intérêt. Et pour que Belle et son père ne préviennent pas la Bête de ce qui l'attend, il les enferme chez eux. Il crit « La Belle est à moi ! » avant d'envahier le château de la Bête, ce qui montre qu'il veut seulement la posséder. Il n'a aucun scrupule à tirer une flèche dans le dos de son adversaire, qui n'a pas l'intention de se battre. Son rire est diabolique quand il est proche de son but. Un long affrontement a lieu et lorsque la Bête a le dessus mais décide de le laisser partir, il le poignarde dans le dos. Gaston n'a aucun remords dans chacune de ses mauvaises actions.
 
D. L'importance des méchants dans les Walt Disney
 
Les méchants créent l'action ; en effet, si le héros est mis en valeur, c'est essentiellement grâce aux méchants qui lui tendent des pièges. Le méchant crée l'action et le héros réagit. Un personnage principal acquiert son statut de héros seulement lorsqu'il a traversé toutes les épreuves dont il doit triompher.
Les méchants peuvent commettre toutes sortes d'atrocités sans avoir le moindre remords. Ils peuvent aller jusqu'à faire souffrir leur complice sans avoir aucun état d'âme. C'est ce qui les caractérise.
Les enfants font facilement la différence entre les gentils et les méchants dans les films de Walt Disney. En effet, ils sont souvent très typés pour qu'il puisse les reconnaître, que ce soit physiquement ou moralement. L'enfant arrive donc facilement à savoir sans ambiguïté où sont le bien et le mal. Ainsi, Walt Disney lui permet de s'identifier au bon, grâce à l'image, à la musique et aux dialogues. Plus les pièges que le méchant tend semble insurmontables, plus la leçon est claire pour l'enfant ; seuls l'effort, l'intelligence et le courage permettent de dominer les monstres obscurs.